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Mission d’information sur la déontologie des fonctionnaires et l’encadrement des conflits d’intérêts

Information générale

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30/11/2017

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Mission d’information sur la déontologie des fonctionnaires et l’encadrement des conflits d’intérêts

Réponse de l’AAEENA (Commission Fonction Publique)

au questionnaire préparatoire à l’audition

 

  1. L’enseignement et la culture de la déontologie

 

1. Selon vous, quel rôle peuvent avoir les associations d’anciens élèves dans la sensibilisation aux questions relatives aux conflits d’intérêts ainsi qu’aux problématiques relatives à la déontologie des fonctionnaires ?

Ces associations constituent, par définition, des « tiers de confiance » pour les anciens élèves. C’est ce qui fait leur force et, au demeurant, cette perception a priori positive existe pour chaque ancien élève (qu’il ait, ou non, la qualité d’adhérent). Assurément, elles doivent investir, a minima pour leurs adhérents, des fonctions d’information et de communication (notamment via des canaux numériques pour une meilleure diffusion) de premier niveau. Elles ont également – et nous insistons sur ce point au sein de l’AAEENA – une fonction de réflexion et d’écoute à assumer sur ces enjeux déontologiques. Les anciens élèves viennent aux réunions organisées par leurs associations pour prendre du recul sur l’exercice de leurs fonctions, et la matière déontologique se prête parfaitement à ces temps de réflexion. Les anciens élèves viennent aussi chercher au sein de leurs associations, de leur propre initiative, un lieu d’écoute et de conseil sur des choix de carrières qui peuvent soulever des sujets déontologiques. Au vu de la sensibilité, notamment des « énarques » ayant récemment pris leurs fonctions, à ces enjeux, il s’agit même d’une dimension essentielle pour que les associations d’anciens élèves demeurent attractives.

En tant que Président de l’AAEENA, j’estime que ces associations non seulement peuvent, mais  surtout doivent investir cette mission de sensibilisation afin qu’aucun fonctionnaire ne demeure, dans ce champ déterminant pour la considération des citoyens envers leur administration, avec des questions sans réponses. Par cette sensibilisation, elles doivent, à leur échelle et avec leurs moyens d’action, éviter à tout prix que – dans un domaine complexe, où chaque cas est spécifique – un fonctionnaire franchisse, en étant de bonne foi, une « ligne rouge », qui sera un point de non-retour, personnellement et professionnellement. Cette responsabilité est particulière pour l’AAEENA dans la mesure où l’ENA, les « énarques » et l’Etat vont organiquement ensemble. Selon une étude sociologique réalisée à l’occasion des 70 ans de l’ENA[1], près de 80 % des anciens élèves n’ont jamais exercé au cours de leur carrière dans le secteur privé et la proportion des anciens élèves ayant quitté définitivement le service public atteint 8% et 22% des « énarques » acquièrent par une expérience dans le secteur privé à un moment ou un autre de leur carrière.

J’ajoute que ces fonctions d’information, de communication et de réflexion sont indispensables, personnellement (en qualité d’ancien élève attaché à ces sujets fondamentaux pour l’Etat) mais aussi professionnellement pour de nombreux « énarques » : en effet, l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983 prévoit que les chefs de services sont directement investis par le législateur d’une responsabilité dans le respect de la déontologie et la mise en place de chartes au sein de leurs services. Les associations d’anciens doivent donc les aider à développer leur propre culture. En effet,  si la « vague » normative de ces dernières années était nécessaire, il reste collectivement à atteindre l’essentiel : la diffusion d’une culture de la déontologie et de la prévention des conflits d’intérêts. Or une culture se partage. Et il ne convient pas tout attendre de l’Etat, ce qui signifie que les associations d’anciens élèves ont une responsabilité particulière qu’elles doivent assumer pour participer, à leur niveau, à la diffusion d’une culture de la morale publique et, ainsi, pour faire œuvre d’intérêt général.

2. Quel regard portez-vous sur les modules dédiés à la déontologie et à l’encadrement des conflits d’intérêts dans la formation initiale et dans la formation continue ? Vos associations y sont-elles associées et, si oui, de quelle manière ?

L’AAEENA n’a pas de visibilité sur ces formations au sein des écoles du service public.

Elle ne peut qu’appeler l’attention de la mission d’information sur la nécessité de fixer un objectif visant à rendre ces formations obligatoires, a minima pour les écoles formant des cadres ayant vocation à être nommés dans des corps (ou cadres d’emplois) de catégorie A ou « A+ ». Il s’agit d’un enjeu fondamental pour l’Etat, qui ne peut être éludé au sein des écoles administratives.

Au-delà du cadre théorique de l’action de chaque fonctionnaire, lequel est notamment encadré par des règles de droit, il serait particulièrement utile de prévoir, dans un tel cadre, des maquettes pédagogiques faisant une large place à des cas pratiques et des retours d’expérience. En effet, la déontologie est essentiellement un questionnement, un réflexe, une attitude - une culture.

Pour le reste, l’AAEENA n’est pas associée aux modules pédagogiques dédiés à la déontologie et à l’encadrement des conflits d’intérêts dans la formation initiale et dans la formation continue, que ces formations soient assurées par l’ENA ou d’autres écoles administratives.

3. Au sein de vos associations, proposez-vous des actions spécifiques sur ces sujets ?

Si la question de l’éthique publique a fait l’objet d’une réflexion au sein de la revue de l’ENA (« L’Ena Hors les murs »), la mission d’information a conduit l’AAEENA à s’interroger sur des actions spécifiques. En tant que Président de l’AAEENA, je proposerai d’inscrire à l’agenda de nos instances une réflexion particulière sur deux actions spécifiques :

- d’une part, en tant que lieu de rencontre et d’échange, l’AAEENA peut  devenir un catalyseur de bonnes pratiques en matière de prévention des conflits d’intérêts. Nous organisons fréquemment des ateliers et des rencontres (sur la mobilité, les réseaux sociaux, etc.).  Notre offre de services pourrait être élargie à la question déontologique afin de faire connaître aux anciens élèves,  qui sont confrontés directement (dans le cadre d’un projet personnel de carrière) ou indirectement (dans le cadre de leurs fonctions publiques), les meilleurs pratiques. Il s’agit aussi de maintenir l’AAEENA attractive auprès des nouveaux « énarques », lesquels sont de plus en plus en attente de réponses sur les exigences d’exemplarité. Ces échanges permettraient de faire vivre une culture de la déontologie via les activités de l’association, au-delà de l’insertion dans les publications de l’AAEENA d’articles et d’entretiens de réflexion.

- d’autre part, la force de l’ENA, qui consiste à miser sur la valeur ajoutée issues d’une diversité dans le profil des élèves, se retrouve dans celle de l’AAEENA : nos membres reflètent la diversité de ces profils, ainsi qu’une solidarité intergénérationnelle très forte. Or il me semble qu’un débat pourrait être lancé sur la façon dont notre association pourrait aider, très concrètement, les administrations de l’Etat à trouver des référents déontologues : en effet, il faut rappeler que l’article 3 du décret n° 2017-519 du 10 avril 2017 relatif au référent déontologue dans la fonction publique prévoit que les référents déontologues peuvent choisis parmi les fonctionnaires, en activité ou retraité. Les anciens élèves de l’ENA ont un profil qui correspond aux « attendus » de l’accomplissement de cette mission : le service de l’Etat et l’exercice de mission d’encadrement ainsi que, pour certains d’entre eux, le recul nécessaire lié à une expérience professionnelle.

 

 

4. Le rapport Pêcheur de 2013 soulignait qu’« il conviendrait de mettre en place un cycle de formation des cadres supérieurs ouverts à un vivier de cadres à haut potentiel sélectionnés dans les corps supérieurs de l’État […] ce cycle serait obligatoire pour les candidats qui auraient été sélectionnés et constituerait une des conditions d’accès aux emplois fonctionnels de direction de l’État ». Cette proposition a-t-elle été mise en oeuvre et avec quel succès ?

 

Comme la mission d’évaluation et de contrôle (MEC) sur la formation continue et la gestion des carrières dans la haute fonction publique l’a relevé, une fois admis dans le vivier des cadres dirigeants, les  hauts fonctionnaires suivent le Cycle interministériel de management de l’État (CIME), programme de formation destiné à les préparer à l’exercice des fonctions de cadres dirigeants.

 

La vocation de ce Cycle est de préparer les cadres à haut potentiel, identifiés pour exercer les plus hautes responsabilités au sein de l’administration d’Etat, à la performance managériale. C’est la raison pour laquelle les modules portent sur des thématiques liées au savoir-être propre à assurer un leadership. Les propositions de la MEC dans son rapport de juin 2016, semblent être de nature à assurer la mise en œuvre des préconisations - rappelées dans l’énoncé de la question - du rapport « Pêcheur ». Toutefois, la réflexion déontologique semble, sous réserve de confirmation, absente de ce Cycle.

 

 

5. Plus généralement, considérez-vous que les récentes évolutions législatives et réglementaires ont permis la diffusion d’une culture déontologique dans l’ensemble de la fonction publique ?

 

S’il s’agit d’une appropriation à l’échelle de « l’ensemble de la fonction publique », la réponse à la question est sans doute négative. Le temps « normatif » était indispensable. En cette fin d’année 2017, l’encre des lois et des décrets est à peine sèche. Certaines administrations, et de nombreux fonctionnaires, ont attendu la publication des textes d’application de la loi pour appréhender les nouvelles règles le nouveau contexte déontologique applicable à l’Etat. Il serait d’ailleurs opportun que la mission identifie les « circulaires » indispensable à la finalisation de ce « paquet normatif », dont certaines sont particulièrement attendues (par exemple, s’agissant de la procédure liée au lancement d’« alertes éthiques »).

 

Deux éléments liés à l’avènement de cette culture déontologique renforcée semblent importants. D’une part, la loi a mis dans la main des chefs de service comme de tout agent public des « outils ». Nous sommes au début de l’appropriation de ces outils. Par exemple, les grands corps d’inspection et de contrôle et, plus largement, les ministères viennent, pour la plupart, de désigner leurs référents déontologues. La rédaction des chartes déontologiques - qui n’ont de réel intérêt que si elles sont adaptées aux missions des agents, afin qu’elles puissent leur « parler » dans l’exercice quotidien de leurs fonctions - nécessite de prendre du temps pour qu’elles fassent « sens » au sein des services. D’autre part, ces lois, même non maîtrisées dans leur détail par les agents, ont constitué un signal fort pour toute la fonction publique. Si les « outils » et les procédures ne sont pas encore diffusés dans chaque service public, il ne faut pas sous-estimer ce signal - parfaitement perçu et reçu par les nouveaux fonctionnaires.

 

C’est une inflexion importante qui, si la mise en œuvre et la diffusion d’une nouvelle culture déontologique sont « endossées » par les responsables publics, et régulièrement contrôlées et évaluées, renouvelle notre approche de l’exercice de fonctions publiques. Les « énarques » ont une responsabilité éminente dans la diffusion de cette culture. De ce point de vue, les travaux de la mission d’information constituent une opportunité collective pour continuer à « mettre sous tension » les acteurs publics afin d’assurer sa diffusion dans les meilleurs délais.

 

  1. Passage public-privé

 

6. La mission d’évaluation et de contrôle sur la formation continue et la gestion des carrières dans la haute fonction publique 1 relevait que le « durcissement des règles pourrait s’avérer contre-productif et nuire à la mobilité vers le privé ». Le directeur général de l’école polytechnique relevait à cette occasion que cela pourrait « à terme dissuader certaines personnes d’entrer dans la fonction publique par crainte d’y rester enfermées [et que cela] nuirait fondamentalement aux intérêts de l’État en tant qu’employeur, qui doit pouvoir respirer en attirant des compétences venues de l’extérieur et, inversement, en permettant à certains de ces ingénieurs de poursuivre une partie de leur carrière ailleurs ». Considérez-vous qu’un tel risque existe et si tel est le cas, comment trouver un juste point d’équilibre ?

Certains opérateurs de l’Etat relèvent, d’ores et déjà, un effet sur l’attractivité des emplois publics parmi les talents issus du secteur privé qu’ils cherchent à recruter pour mener efficacement leurs missions. En tant que Président de l’AAEENA, le point d’équilibre à chercher me semble être le suivant : réguler dans la transparence, et non interdire ou dissuader. Il semble indispensable de publier, automatiquement, les avis rendus par la commission de déontologie, sous réserve d’anonymisation (comme pour les décisions de justice consultables sur Légifrance).

Cette mesure de transparence ne peut être que profitable à l’intérêt général : pour l’ensemble de la communauté publique, elle permettrait de se rendre compte des lignes directrices générales, et des critères d’examen plus précis, qui guident l’appréciation de la commission de déontologie dans l’examen des dossiers qui lui sont soumis. Pour le citoyen, elle assure une information directe. Dans tous les cas, la transparence est de nature à lever des craintes - voire des fantasmes - et de ramener de l’objectivité s’agissant du contrôle du départ des agents vers le secteur concurrentiel.

Si d’autres mesures peuvent être suggérées, cette mesure, qui s’ajoute à l’ensemble du « paquet » normatif récemment mis en œuvre, permet de trouver le point d’équilibre.

7. Pensez-vous qu’il soit nécessaire de favoriser les mobilités entre le secteur public et le secteur privé ? Si oui, selon quelles modalités ?

Les mobilités entre le secteur public et le secteur privé correspondent aux orientations de la RH publique depuis plusieurs années, elles traduisent également une attente forte des fonctionnaires qui souhaitent diversifier leurs parcours professionnels, dans une société de plus en plus « ouverte » et alors que la contrainte pèse sur le recrutement public.

Les règles de droit sont, en grande partie, adaptées à l’exercice de telles mobilités. Deux mesures pourraient toutefois être proposées pour « sécuriser » et « accompagner » ces situations de départ vers le secteur privé et de retour vers le secteur public :

  • D’une part, la « sécurisation » pourrait passer par un contrôle « statutaire » (et non plus uniquement pénal et déontologique) légalement confié à la commission de déontologie : par exemple, lorsqu’un fonctionnaire souhaite partir en détachement au sein du secteur privé car il estime qu’il s’agit d’occuper un emploi au sein d’une entreprise « d’intérêt général » (cf. décret « positions FPE » n° 85-986 du 16 septembre 1985, article 14-5°-a), la commission opérerait un contrôle sur ce caractère « d’intérêt général ». S’il s’avère que l’emploi proposé dans le cadre de ce projet répond à cette notion, la commission ne modifierait pas la position statutaire envisagée par l’agent. En revanche, s’il s’avère que tel n’est pas le cas et que l’agent ne peut rejoindre cet emploi qu’en disponibilité (ou uniquement en démissionnant), la commission le signalerait dans son avis. Il s’agirait, pour cette réforme simple à mettre en œuvre, d’éviter certains « effets d’aubaine » tout en sécurisant les parcours professionnels.

 

  • D’autre part, s’agissant de l’accompagnement au moment du retour dans les services après une expérience dans le secteur concurrentiel, il est nécessaire de prévoir un dispositif RH mieux calibré. Par exemple, un rapport annuel, synthétique et axé sur les compétences acquises par le fonctionnaire à l’occasion de son expérience dans le secteur privé, pourrait être transmis à son administration d’origine afin que les services RH anticipent mieux les postes pouvant être offerts à l’agent en fonction des compétences et des expériences acquises. Dans une perspective de prévention des conflits d’intérêts, cette information RH qualitative permettrait aux administrations d’identifier les postes qui ne peuvent pas être proposés, au retour dans la fonction publique, à ces agents ayant eu une expérience privée.

 

8. Pouvez-vous dresser une typologie des fonctionnaires issus de vos écoles exerçant ou ayant exercé des activités au sein du secteur privé ? Disposez-vous d’éléments statistiques en la matière ? Les départs dans le secteur privé sont-ils plus nombreux aujourd’hui qu’hier ? Selon vous, quelles sont les différentes motivations justifiant un tel choix ?

Comme indiqué, selon une étude réalisée à l’occasion des 70 ans de l’ENA[2], près de 80 % des anciens élèves n’ont jamais exercé au cours de leur carrière dans le secteur privé et la proportion des anciens élèves ayant quitté définitivement le service public atteint 8% et 22% des « énarques » acquièrent par une expérience dans le secteur privé à un moment ou un autre de leur carrière.

Au-delà de ces données générales, l’AAEENA ne dispose ni d’une typologie fine, ni d’éléments statistiques et historiques permettant de mesurer l’ampleur des départs vers le secteur privé (hormis le fait que ces « passerelles » dépendent du rôle que l’Etat entend jouer dans la vie économique : ainsi, ces « passages » ont été nombreux au cours des années 1980).

Les motivations ne sont pas évidentes à dresser : elles peuvent tenir à des opportunités de diversification de son parcours professionnel, dans une logique d’acquisition de compétences utiles à terme pour accéder aux plus hautes responsabilités publiques, comme à des choix liés à des carrières qui peuvent être moins attractives dans certaines administrations, lesquelles ont limité - dans un contexte de contrainte budgétaire - les perspectives ascensionnelles des cadres.

La rémunération offerte par des entreprises du secteur privé n’est sans doute pas le premier levier de motivation pour quitter la sphère publique : l’importance des responsabilités confiées, des missions exercées et des marges de manœuvre qu’offrent les postes de direction et de management dans le secteur privé peuvent conduire certains cadres publics, s’ils en ont l’opportunité, à relever, pour quelques années, un défi professionnel permettant de valoriser leurs compétences et d’acquérir une nouvelle expérience.

9. Que pensez-vous de l’idée d’instaurer une interdiction pour un fonctionnaire d’exercer une mission de service public en lien avec une activité précédente pendant une durée de trois ans ?

Il pourrait être préférable, comme évoqué ci-dessus, de réguler dans la transparence plutôt que d’interdire.

10. Considérez-vous qu’un avis de la commission de déontologie en cas de retour du secteur privé vers le public soit nécessaire ?

Il conviendrait de s’assurer au préalable que cette proposition n’engendre pas une « lourdeur » préjudiciable au fonctionnement de la commission, et aux projets professionnels de mobilité public/privé. En revanche, un entretien déontologique pourrait être prévu. Il est essentiel que la déontologie publique soit une culture partagée, qui responsabilise les employeurs publics - et non l’inverse. Ajouter une strate de contrôle serait contre-productive pour les employeurs publics, qui doivent demeurer responsables de leurs choix de recrutement.

11. Une interdiction générale pour un représentant d’intérêts d’exercer toute action pour le compte ou auprès d’une personne morale de droit public dont il aurait été le fonctionnaire ou l’agent vous paraît-elle nécessaire ?

Les règles encadrant l’activité des représentants d’intérêts sont trop récentes pour vouloir d’ores et déjà procéder à une telle interdiction. Celle-ci serait l’expression d’un « principe de soupçon », par définition, sur l’activité de certains anciens agents publics au regard de leur passé professionnel au sein de la fonction publique. A tout le moins, il conviendrait d’évaluer cette proposition par des travaux objectifs et une étude d’impact fine.

 

12. Quelle appréciation portez-vous sur l’articulation des missions de la commission de déontologie avec celles de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) ?

 

Il faut être pragmatique. L’approche déontologique conduit à un questionnement permanent dans l’exercice de ses fonctions publiques. Si, à l’occasion d’un projet professionnel (de départ vers le secteur privé ou de cumul d’activités), les agents ne savent pas à qui s’adresser parce qu’ils ont entendu que ces deux organismes avaient des compétences en matière de transparence publique, cette nouvelle culture déontologique va être perçue comme génératrice de lourdeur et d’illisibilité.

 

Rendre la HATVP seule compétente permettrait, en outre, de doter les services de ces organismes des moyens nécessaires à leur action. Si, demain, le choix du législateur est d’accentuer le suivi des fonctionnaires qui exercent dans le secteur privé, cette Haute Autorité sera en capacité d’assurer cette mission qui, actuellement, n’est guère exercée par les services compétents.

 

Au sein de la HATVP, différents collèges spécialisés pourraient permettre de prendre en compte les spécificités propres aux agents publics, et aux différentes fonctions publiques, dans l’appréciation des projets professionnels qui lui seront soumis pour contrôle. Elle dispose de nombreux moyens de contrôle et d’enquête. Enfin, la HATVP, malgré sa création récente, jouit d’une réputation positive et d’un statut juridique (AAI) lui permettant d’exercer ses missions avec efficacité et indépendance : une intégration de la commission de déontologie au sein de la HATVP permettrait d’achever l’édifice institutionnel de la déontologie publique avec rationalité.

 

  1. Remboursement des frais de scolarité

 

13. Que pensez-vous des règles applicables en matière de remboursement des traitements ou indemnités perçus lors de leur scolarité par les fonctionnaires bénéficiant d’une mise en disponibilité et n’ayant pas respecté l’engagement de rester au service de l’État pendant la durée minimale requise ? Disposez-vous d’éléments statistiques en la matière ?

 

S’agissant des règles applicables en matière de remboursement de la « pantoufle », celles-ci ont été récemment réformées (décret n° 2017-929 du 9 mai 2017 relatif à la position de disponibilité des fonctionnaires de l'Etat souhaitant exercer une activité dans le secteur privé). Applicable au 1er janvier 2018, la réforme vise les anciens élèves de l’ENA, des Mines, des Ponts et Chaussées, de Polytechnique ou de Normale sup’. Un point d’équilibre a été atteint. Si des évolutions devaient intervenir, plutôt que d’introduire de nouvelles restrictions, une réflexion sur le « barème » actuel de la « pantoufle » (entre 15 000 et 53 000 euros) pourrait être initiée.

 

[1] Etude basée sur un échantillon de 10 promotions de l’ENA de la promotion Léonard de Vinci (1983 - 1985) à la promotion Willy Brandt (2007-2009).

[2] Etude basée sur un échantillon de 10 promotions de l’ENA de la promotion Léonard de Vinci (1983 - 1985) à la promotion Willy Brandt (2007-2009).

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